La Bastide-des-Jourdans
Département: Vaucluse, Arrondissement: Apt, Canton: La Tour-d'Aigues - 84
Domus Hospitalis Bastide-des-Jourdans
Dans le cours du XIIe siècle, les Hospitaliers, qui furent appelés Chevaliers de Malte, avaient reçu des comtes de Forcalquier la terre, château et bourg de Manosque, avec divers droits et possessions aux terroirs de Beauvezer, Grambois, Beaumont, Corbière, Sainte-Tulle, Dauphin, La Roque, Voulx et Montagut. Lorsqu'ils eurent été mis en possession des biens des Templiers, la Commanderie de Manosque eut sous sa dépendance Limaye et la Cavalerie à la Bastide-des-Jourdans, les Iscles de la Durance, et le Bourguet à Reillanne. Elle était alors une des plus riches de l'Ordre, mais au XVIe et au XVIIe siècle, elle était devenue une des plus médiocres, elle avait aliéné une bonne partie de ses droits et de ses domaines, pour contribuer aux grandes dépenses que les Chevaliers étaient obligés de faire, dans leur lutte contre les infidèles.
Limaye
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Domus Hospitalis Limaye
Mais dans la visite de 1681, le fermier de la Cavalerie faisait observer que l'acte du 10 juin 1615 n'était qu'une confirmation d'aliénations antérieures. En effet aux archives des Bouches-du-Rhône on trouve mentionnés :
1° l'acte du nouveau bail reçu le 28 avril 1487 par Me Clémenti, notaire à Manosque, et par lequel la jouissance du membre de la Cavalerie était donnée à Jean Fauveau.
2° l'acte d'inféodation du même domaine faite, le 11 mai 1503, à noble George Astaudi.
Pendant tout le XVIIe siècle, la Cavalerie fut possédée, à titre de fief, par les de Coriolis de Limaye, Seigneurs de la Bastide-des-Jourdans.
La Cavalerie
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Domus Hospitalis Cavalerie
De concert avec M. Morellet, curé de la Bastide-des-Jourdans, le Président de Coriolis forma le projet de faire de la Cavalerie un monastère de Frères laboureurs, pour encourager les agriculteurs des environs, les édifier, les diriger et les aider dans leurs travaux.
A cette époque, il y avait au monastère de Saint-Hilaire à Ollières, près de Saint-Maximin, dans le diocèse de Fréjus, une Communauté de Religieux Bénédictins, appelés Frères Hermites, fort estimés, soit pour leur habileté dans la culture des champs, soit pour la régularité et la sainteté de leur vie. C'est au Prieur de ce monastère, le Frère Antoyne Trompey que M. de Coriolis demanda quelques Religieux, pour l'établissement qu'il voulait fonder. Le 7 septembre 1706, par acte reçu par Me Brunet, notaire royal à la Bastide-des-Jourdans, ledit Seigneur Président « étant bien et dûment informé de la vie exemplaire et pénitente du Père Isaac Martin, frère Antoyne Trompey, et de ses confrères, qui ont renouvelé de nos jours ce qui était pratiqué par les anciens Pères du désert, et qui, pour n'être pas à charge au peuple, pourvoyent à leur entretien, par le travail de leurs mains ; voulant contribuer à leur saint établissement, pour avoir part aux prières et aux bonnes œuvres desdits solitaires, a, de son plein gré, donné à nouveau bail (1), et emphytéose perpétuelle, sous le bon plaisir de Mgr l'Archevêque d'Aix, au dit Antoine Trompey, assisté du frère Mathieu Boullet, et leurs successeurs, l'affard de terre et tènement, que feu Messire Claude de Coriolis, Seigneur desdits lieux, avait retenu par droit de prélation, l'an 1560, dans le terroir dudit Limaye, quartier de la Cavalerie, avec tout le batiment et la vieille église qui s'y trouvent ; pour en jouir, eux et leurs successeurs, en qualité d'usufruitières seulement ; demeurant le domaine et la propriété du fond audit Seigneur et à ses successeurs, et tiendront le tout, sous la mayeur, directe, seigneurie et juridiction dudit Seigneur, des siens et d'iceux ayant cause, à la charge de leur payer la tasque de tous les grains recueillis dans ledit tènement, laquelle tasque sera prise sur l'aire à grains, net, avant que d'en rien livrer ; plus payeront lesdits Frères un demi panal beau bled de cense, pour chacune saumée de terre en pré, vigne, verger et jardin, qui s'y trouvent déjà, ou que l'on fera....
1. Sous le régime féodal, le bail simple était à terme, mais le nouveau bail était une convention, par laquelle un Seigneur cédait la jouissance d'un domaine, pour un long terme, ou même à perpétuité, sous la réserve d'une redevance ou de certaines conditions.
« Seront obligés lesdits Frères de résider dans ledit tènement, de le cultiver eux-mêmes, sans pouvoir l'arrenter, ni transporter ailleurs les fruits et denrées qu'ils recueilleront, pour l'entretien d'une autre Communauté, mais en feront la consommation audit lieu, à peine de la privation d'iceux, hormis de la charité fraternelle, qu'ils pourront exercer sans préjudice de ladite maison...
« Ils ne pourront vendre ni aliéner ledit tènement ni parti d'icelui, pas même en faveur d'aucune Communauté religieuse, sous prétexte de fondation, ni en faveur d'aucun particulier, à titre de vente, d'échange ou autrement, à peine de nullité, et de réunion des objets aliénés au domaine dudit Seigneur...
« Ils ne pourront, faire aucune quête audit lieu de Limaye, ni ailleurs, mais ils seront obligés de pourvoir eux-mêmes à leur entretien par le travail de leurs mains... « Ils ne pourront avoir, eux et leurs successeurs, aucune part aux affaires de la Communauté, entrer dans le conseil d'icelle, ni faire aucune fonction publique, ni se mêler d'aucune sorte d'affaire...
« Ils seront obligés de passer reconnaissance des terres ci-dessus données, sous les pactes et conditions exprimés, toutes les fois qu'ils en seront requis...
« Ne pourra être donné aucun trouble audits Frères par ledit Seigneur et les siens ; et en cas de trouble, veut ledit Seigneur que les biens qu'il a acquis à la Bastide et Limaye soient subrogés à la place de ceux aliénés par le présent acte, et qu'il soit tenu compte aux Frères de toutes dépenses, dommages et intérêts...
« Se réserve ledit Seigneur pour lui et les siens le droit de faire un appartement dans la maison que les Frères feront construire, un jardin pour son usage particulier, et tous les droits honorifiques dans ladite maison et chapelle, pour lui et les personnes de sa famille, en qualité de Seigneur et de bienfaiteur, et comme donnant lieu à ce saint établissement, en considération duquel les Frères prieront pour ledit Seigneur et sa famille...
« La vieille église ou chapelle, qui sera rétablie par les Frères, ne pourra jamais être érigée en bénéfice ou prieuré, ni estre tenue et possédée, non plus que les susdits biens, par autre que par lesdits Frères et leurs successeurs, qui ne pourront à l'avenir acquérir aucun affranchissement de la juridiction et redevance convenues ci-dessus, et s'il leur était accordé, les dits Frères, tant pour eux que pour leur successeurs, consentent que ledit affranchissement soit nul et de nulle valeur...
« Et sera ladite maison et chapelle sous le titre de Notre-Dame de la Retraite, pour la solennité en être faite, autant qu'il convient à la simplicité et pauvreté des dits Frères Hermite, le Ier jour de l'an, jour de la Circoncision ; le 8 septembre, jour de la Nativité de la Sainte Vierge ; et le 19 de mars, jour de la fête de St-Joseph ; auxquels jours sera dit par les Frères, immédiatement après leur communion, les litanies du Saint-Nom de Jésus, de la Sainte-Vierge et de St-Joseph, pour demander les secours du ciel et les grâces nécessaires audit Seigneur Président, et aux personnes de sa famille, pour faire sûrement leur salut...
« Ainsi stipulé et convenu de pacte exprès ; entre les parties, sans quoi ledit Seigneur Président Saurait fait le présent nouveau bail...
« Acte fait, à La Bastide, dans le château dudit Seigneur Président, en présence de Martin Morellet ecclésiastique, et Jean Claude Clapier, marchand et consul moderne, témoins requis et signes avec lesdites parties : Baron de Limaye, Antoyne Trompey, Morellet, Mathieu Boullet, J. Clapier, et nous notaire Brunet. »
Sources : Le R. P. Marie-Benoît Barnouin, supérieur du monastère de La Cavalerie. Aperçu historique sur La Cavalerie. Redon, François-Xavier.
Aubanel Frères, Imprimeurs de N. S. P. La Pape, Avignon 1900 - BNF